L’après-crise du Coronavirus : quelle reconstruction européenne et française ? 

2020, 70 ième anniversaire de la déclaration SCHUMAN. L’après-crise du Coronavirus : quelle reconstruction européenne et française ? 

C’est, par un texte «fort et clair» que Robert SCHUMAN, ministre des Affaires étrangères, interpellait les consciences, le 9 mai 1950 et transformait la catastrophe mondiale de la seconde guerre mondiale en une formidable opportunité pour éteindre les virus opposant les pays européens et lancer la seule construction démocratique d’une union des peuples d’Europe.

Bien sûr on se souvient de la création de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) et de la Haute Autorité en 1953. Mais qui se souvient de sa volonté de créer également une «Communauté européenne de la santé» ?

Pascal LAMY plaide pour une démarche anthropologique de « prise au sérieux des différences (entre les peuples) qui permettent, par leur compréhension, d’accéder à une reconnaissance de ce qui nous rassemble en tant qu’européens».

Derrière les errements de gestion de la crise en France et par l’UE il y a ce caractère commun d’ «universalisme» derrière lequel la France s’est érigée en modèle depuis les «lumières» et la révolution de 1789 et derrière lequel l’UE évite d’approfondir ses modalités de fonctionnement. Cet «universalisme» les entrave dans l’approche du «particulier» nécessaire dans le quotidien et se révèle tout à la fois une faiblesse coupable en temps de crise mais également une cause commune favorable aux évolutions positives.

La santé constitue le domaine de prédilection du traitement du «particulier». C’est aussi le domaine institutionnel qui recueille, en France, le plus de confiance de la part des citoyens.

La santé, en France, n’a pas échappé à l’emprise de l’universalisation étatisée depuis que les assurances sociales interviennent.

Aujourd’hui la santé joue un rôle politique majeur en faisant passer des régulations que le pouvoir ne réussit pas à obtenir, faute de consensus.

La santé est donc au croisement du «particulier» et de « l’universel» avec une forte emprise de l’universel. Le» particulier» n’agissant que par exception. La crise du coronavirus en est une illustration éloquente.

Qu’avons nous constaté en France ? Les EHPAD ainsi que les services à la personne ont été livrés à eux-mêmes pendant de longues semaines, sans protection, ni tests et sans consignes .L’effet a été catastrophique dans un système vertical et centralisé habitué aux consignes, rappelant la période caniculaire de 2003.

Ce n’est qu’une violente mise en lumière de l’absence de considération pour tous ces services à la personne, domaine du «particulier» par excellence que ce soit auprès des personnes âgées ou auprès de la petite enfance. La crise a un effet de loupe.

Ces échecs sont l’illustration d’une décentralisation inachevée qu’une série de recettes (contractualisation, coordination, partenariat, coproduction, territorialisation, secret partagé…) tente vainement de pallier, faute de clarté sur les enjeux.

Le levier pour agir réside dans l’alliance de l’énergie potentielle des citoyens, des professionnels de la santé (au sens large) et des élus locaux dans le cadre d’un care à la française, la convivance, au sein des collectivités locales pour sortir de l’opposition entre le communautaire (à l’anglo-saxonne) et le local-étatiste (à la française).

Il s’agit d’imbriquer le «particulier» et l’ «universel» par le soutien à des « réseaux de vie et d’interdépendance» entre patients, aidants, soignants de l’auxiliaire de vie au médecin en passant par les IDE, aide-soignants, kinés, psychologues … configurés afin de devenir des outils de soins, d’attention et de médiation dans chaque lieu de vie et/ou de soin, les crèches et leurs succédanés (micro-crèches, MAM ..), les maisons de santé, de seniors, de sport et santé, les associations de service à la personne, les groupements d’entraide pour les malades psychiques, les centres sociaux, de quartier.

Ces réseaux auraient été aisément mobilisables pour une approche «patients» d’identification des symptômes et de traitement au plus près des personnes concernées et leur entourage.

L’Europe continuera à se faire « par des réalisations concrètes créant des solidarités de fait ». La déclaration SCHUMAN n’a pas pris une ride.

 

Christian Tabiasco
Président de la section Morbihan du Mouvement Européen France ME-F

 

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